Pendant 23 ans Robert Chabot a habité Saint-Charles de Limoilou. Il a 78 ans aujourd’hui. Extraits d’entrevue sur le temps d’avant, suite à ce billet.
J’pense qu’on ne passait pas deux jours sans voir un Capucin qui venait nous saluer.
— Ils venaient pourquoi ?
— Ils venaient faire leur lavage ! Maman lavait leur linge ! Ils venaient placoter. C’était des gars qui étaient séparés de leur famille très jeune, pis là ben ça venait un peu des campagnes ces gars-là, y’a pas grand Capucin qui venait de la ville, c’était souvent des gars de grosses familles pis parce que la famille chez nous étant grosse pis maman accueillante, on leur faisait des petites gâteries. Y’en avait un, Venance, le père Venance, y’a été un pionnier, c’est dommage qu’on aille tout perdu ça à ma connaissance, il faisait du cinéma minuté, c’est-à-dire, j’vais te donner un exemple, une plante – ça se fait maintenant, c’est beaucoup plus moderne – une plante qui grossissait. Alors toutes les trente minutes il prenait une photo de la plante, ou toutes les deux heures, de sorte qu’il montait son film pis on voyait la plante pousser, s’épanouir. Y’a fait de la projection chez nous. »
Censure à la salle paroissiale !
Pis c’était contrôlé, la salle paroissiale, par la communauté des Capucins. J’avais un de mes frères, Jean, qui vit encore, qui était projectionniste. Tous les films devaient être visionnés par un curé avant d’être projetés. Même les films qui étaient jugés tout âge, pis des fois mon frère avait l’ordre, parce qu’il y avait un couple qui s’embrassait pudiquement, de couper ça, ou ben donc de faire un bris.
— Comme si c’était un accident ?
— Ah oui, c’était pas beau! Alors mon frère, pendant la projection, il mettait un carton, pis là ça assombrissait !
— Est-ce que les gens avaient conscience que c’était de la censure ?
— Non, c’était pour les enfants surtout ce cinéma-là, ils pensaient que c’était une défaillance du système. Pis après ça, les bouts qu’il avait enlevés, mon frère, fallait qu’il les replace sur les rouleaux de film. C’était long ça, des fois. »
En temps de guerre
Je peux te dire qu’on était très impressionnés lorsqu’il y avait des exercices de guerre, lorsqu’ils faisaient chanter les sirènes, y’avait des sirènes sur les toits des maisons et des entreprises un peu partout dans le temps de la guerre, y’avait même après 1945, quand j’étais jeune, des exercices militaires. Fallait tout éteindre les lumières, on nous entraînait à faire face à un raid aérien éventuel. Pis là y’avait des polices militaires qui allaient visiter les gens dont les lumières n’étaient pas éteintes. Fallait que ça soit des blackouts. Fallait jouer le jeu de la noirceur, pis fallait pas sortir non plus, on était mort. On jouait au mort. Ça j’aimais ça.
Côme, qui était parti à la Deuxième Guerre mondiale, était revenu amputé d’une jambe, et tout Saint-Charles de Limoilou était allé l’accueillir à l’Anse aux foulons. Il revenait en bateau. C’était le héros local. Sa famille avait un magasin de marchandises sèches, des tapis, des serviettes, au coin 4e avenue et 3e rue. »
Les fêtes du Cinquantième
1946 : Cinquantième de Saint-Charles de Limoilou. Robert garde un souvenir intense paroissial que de ces célébrations.
Un succès monstre comme je n’ai jamais revu par la suite ! Organisé par toute la communauté des Capucins. Y’avait composé une chanson spéciale pour ça, y’avait la parade dans les rues. Les gars avaient comme couleurs le brun et le jaune, comme les foulards scouts, pis les filles avaient la même chose, pis là des parades avec des musiques, ça chantait à tel point que quand les fêtes ont été finies, le dimanche, ben l’autre dimanche il y a eu une reprise de ça, spontanément organisée par les gens ! C’était très vivant. »
Ce n’est pas d’hier que les Limoulois ont le cœur à la fête et à l’esprit de communauté !
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