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Fin abrupte de ma carrière de servant de messe à Sainte-Odile

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Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Voici un second clin d'œil sur la pittoresque époque des servants de messe.

Quand nous étions jeunes, mon père, Pierre, insistait pour que moi et mon jumeau Richard nous demeurions servants de messe. Il disait souvent, à notre grand désarroi :

« J'ai été dans le Chœur, à Saint-Charles-de-Limoilou, jusqu'à 21 ans. Je veux que vous en fassiez autant ici, à Sainte-Odile ».

Heureusement, un événement allait mettre une fin abrupte à la longue carrière religieuse à laquelle notre père nous destinait, et ce, dès avant nos 12 ans.

« La force dans les bras me manquait et j'en tremblais »

J'étais le servant principal lors d'une messe dominicale pendant la période du Carême.

Rendu à la lecture de l'Évangile, la nouvelle mode du rite catholique voulait que le servant se présente devant le célébrant avec l'immense volume de l'Évangile, dos à l'assistance, qu'il le soulève et le tienne ouvert à la bonne page pour permettre au célébrant d'en faire la lecture chantée, les bras et les mains ouvertes devant les fidèles.

Or les lectures étaient alors vraiment longues, dans le temps du Carême, et le vieux curé était très grand. Si bien que le pauvre servant que j'étais peinait à tenir ce lourd volume à bout de bras devant le célébrant. La force dans les bras me manquait et j'en tremblais; le curé en avait perdu sa ligne. Il m'avait alors agrippé les deux poignets et m’avait fixé sévèrement en me conseillant d'arrêter de bouger.

J'avais eu beau essayer, prier à voix basse pour que le Saint-Esprit me prête la force nécessaire, rien n'y avait fait! Mes bras tremblaient compulsivement. Le curé avait arrêté subitement la lecture de la Sainte Évangile. Il m’avait lancé une « sacrée gifle » au visage et il m’avait pris le livre des mains pour poursuivre la lecture, me laissant penaud devant lui. L'orgueil et la honte me tordaient les « entrailles bénies »!

Malheureusement, ou plutôt heureusement, Maman était assise dans les premiers bancs à l'avant.

La messe s'était terminée sans anicroche. Le défilé, présidé par le curé, avait entrepris de traverser l'église par l'allée principale, de l'avant, vers la sacristie, à l'arrière. Nous, les servants de messe, suivions le célébrant, puis finalement l’assistance.

Je savais que maman n'était pas très loin derrière moi. Dès que nous avions ouvert la porte de la sacristie pour laisser passer le curé, elle s'était immiscée entre le curé et nous. Ma mère était dotée d’un sacré caractère et, contrairement à mon père, elle n’était pas une « fan usée » des religieux.

Elle nous avait fait signe, à moi et aux autres servants de messe, de ne pas entrer dans la sacristie. Puis, elle était entrée seule pour parler avec le curé. Nous avions pu entendre le loquet de la porte se verrouiller.

Quelques minutes plus tard, maman était ressortie de la sacristie avec le même sourire épeurant. Elle avait mon manteau dans les mains : « Mets ton manteau, nous partons! Je reviendrai porter ton aube demain. » Nous étions aussitôt partis à la maison.

« Il avait compris qu'il devait se tenir pantois »

Lorsque mon père, Pierre, m’avait vu entrer avec une « face de Carême », l'aube blanche qui dépassait du manteau, suivi de maman, il se demandait bien ce qui s'était passé. Pierre et maman se connaissaient trop bien. En voyant l'expression simulée de calme qu'affichait le visage de ma mère, mon père avait compris qu'il devait se tenir pantois, surtout ne rien dire. Sinon, il pouvait très involontairement provoquer un drame.

Maman m’avait alors demandé de débiter mon histoire. Quand j'avais eu terminé, elle s’était tournée vers Pierre :

« Après la messe, je suis entrée dans la sacristie pour parler, seule, avec le curé. Nous avons convenu que les jumeaux se retiraient dorénavant du chœur et des servants de messe. »

Finalement, grâce au tempérament colérique du curé et à celui de ma mère, nous n’avons pas eu à servir la messe encore pendant plusieurs années.

Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L'histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu'il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.

Souvenir précédent : Le rêve de mon père : nos études classiques à Saint-Jean Eudes.

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