Auteur de D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs, Denys Hawey partage pour nos lecteurs et lectrices ses souvenirs de jeunesse. Ce retour sur une autre tradition catholique en des temps révolus : la bénédiction des véhicules.
Chaque année, au printemps, dans la paroisse Sainte-Odile, on procédait à la cérémonie de la bénédiction des véhicules et des voyageurs, sous la protection de Saint-Christophe, le Saint des voyageurs.
Tous les véhicules étaient éligibles à la bénédiction. Ça donnait lieu quelquefois à des parades de véhicules anciens et originaux. Les vélos et leurs propriétaires étaient aussi invités à se présenter à la cérémonie.
Le chamois, pour une voiture étincelante
L’événement avait lieu au tout début du printemps, par un beau dimanche après-midi. Mon père, que j’ai toujours appelé par son prénom, Pierre, avait préalablement shiné, ciré, sa voiture au cours de la journée précédente, le samedi. D’ailleurs, ses plus jeunes frères, Julien et Michel, en profitaient souvent, le samedi matin, pour venir à la maison et pour laver et cirer leur voiture.
En 1963, Pierre avait acheté sa première auto neuve : une Lark de Studebaker, de couleur rouge vin. Il en était très fier.
Pierre faisait partie de cette génération qui adulait les véhicules automobiles. Il était de cette génération Brylcreem, ou plutôt, dans son cas, de la génération Old Spice. Avoir un char, et le tenir impeccablement propre, faisait partie de son ADN.
Alors, en ce dimanche spécial de la bénédiction des véhicules, comme tous les dimanches d’ailleurs, il ne lui restait qu’à passer le chamois pour rendre son véhicule étincelant, avant de se présenter dans la cour d’école pour la bénédiction.
Quant à nous, les jumeaux, nous venions d’avoir nos nouveaux vélos, juste à temps pour les conduire à la cérémonie des véhicules : des CCM de 26 pouces. Nous avions hâte de nous débarrasser de nos vieux « beciks » devenus trop petits, qui avaient perdu de leur lustre en même temps que leurs ailes.
Il ne nous resterait, plus tard, qu'à acheter et à installer la dynamo sur la roue arrière pour alimenter notre lumière. Mes parents avaient insisté pour que nous nous dotions de cet accessoire, si nous voulions rouler à la noirceur venue.
La médaille de Saint-Christophe accrochée au rétroviseur
La cérémonie de la bénédiction des véhicules revêtait un aspect particulier : elle correspondait au lancement de la belle saison. Dorénavant, nous pouvions prendre notre vélo pour nous rendre à l’école. À condition, évidemment, de porter des clips, ces anneaux de métal qui ceinturaient les bas du pantalon à la jambe pour les empêcher de s’accrocher au rouage de la chaîne bien graissée. Il y avait bien un garde-chaîne, mais il ne fallait pas prendre de risque inutile.
Lors de l'événement, tous les véhicules confondus prenaient place en rang dans la cour de l’école. Le moment venu, monsieur le curé Couture arrivait solennellement devant les véhicules alignés pour les bénir,en les aspergeant d’eau bénite à l’aide du goupillon. Heureusement, le curé Couture était plus parcimonieux que le vicaire Jobin. Le curé savait diriger seulement quelques gouttelettes d’eau bénite en direction des véhicules, sans pour autant les doucher comme l’aurait fait le vicaire.
Tout ce beau monde quittait l’endroit, dans l’ordre, dès que chacun avait reçu sa médaille bénie de Saint-Christophe qui trônait dans la voiture, accrochée au rétroviseur, tout à côté du petit sapin vert de « sent-bon ».
Legs pour ses deux enfants et leurs propres enfants, D’Irlande, de Limoilou et d’ailleurs a fait l’objet d’un article sur Monlimoilou. L'histoire de famille et la vie de jeunesse de Denys Hawey, qu'il raconte en 426 pages enrichies de photos, est disponible exclusivement à la Librairie Morency.
Voir le souvenir précédent :
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